12 novembre 2009

Way out in the water, See it swimmin'

"Des déceptions de surface il passe aux désillusions profondes. A chaque nouvelle crise, cependant, il devient plus vivement conscient d'une métamorphose qui n'en est pas une à proprement parler, qui est plutôt l'intensification d'un phénomène caché au plus profond de l'être. Désormais, en fermant les yeux, il est vraiment à même de se voir. Ce n'est plus un masque qu'il voit. Pour être exact, il faut dire qu'il voit sans voir. Vision sans vue, fluide appréhension de l'intangible : vue et ouïe fondues en un seul sens : le coeur de la trame. Là coule le flot des personnalités secrètes, fuyant le contact grossier des sens ; là, les dominantes de la reconnaissance de l'être se heurtent l'une à l'autre, en un clapotement discret d'où jaillissent de lumineuses et vibrantes harmonies. De langage, point ; non plus que de contours dessinés.
Vie créatrice ! Dépassement de soi. Départ en fusée dans l'inconnu du ciel, escalade au passage d'échelles volantes, montée, essor, monde que l'on empoigne aux cheveux et que l'on soulève, débusquage des anges dans leurs antres célestes, voyages accrochés à la queue des comètes. Nietzsche avait décrit ces extases - et puis s'enfonça, s'évanouit dans le miroir pour mourir, enraciné, couvert de fleurs. " Escaliers et escaliers contradictoires", avait-il écrit ; et puis, soudain, tout fut sans fond ; l'esprit, comme un diamant qui éclate, se pulvérisa sous le marteau de la vérité."